9 oct. 2010

Week-end à Šumperk


Quatre des cinq groupes d’Auteuil ayant emprunté la même ligne de train vers l’Est, nous avons laissé un groupe à chaque arrêt et notre sous-groupe (Françoise, Ania et moi-même) s’est retrouvé seul ce vendredi soir pour la dernière partie du trajet et sommes arrivées après 2 heures et demi de train à l’est de Prague en plein pays des Sudètes, non loin de la frontière polonaise. Nous avons été accueillies par le pasteur Hana Chroustova, jeune femme qui a commencé son ministère il y a 18 mois dans la petite ville tranquille de Šumperk (30000 habitants) où elle nous a amené.

Elle nous a conduit au presbytère, rue de la Révolution (cela ne s’invente pas !) ou nous allions passer 2 jours, juste derrière l’église. Avant le dîner, nous sommes allées nous promener dans cette très jolie ville, avec une zone piétonnière très agréable bordée de maisons colorées très bien restaurées qui prouvent bien l’influence allemande. Clin d’œil à l’histoire et à notre visite et coïncidence amusante, nous sommes tombées sur la statue de l’empereur Joseph II avec la mention sur son socle de « son » édit de tolérance de 1781. On ne pouvait pas tomber dans meilleure ville !

Nous avons dîné tranquillement en devisant et en commençant à faire connaissance. Comme Hana m’a proposé de dire la prière pendant le culte, j’en ai composé une le soir avant de m’endormir. Samedi matin, nous avons travaillé, Hana et moi, pour qu’elle puisse finaliser la traduction de ma prédication. Eh oui, étant membre du Conseil presbytéral, et donc représentante « officielle » (« porteuse de message » du sous-groupe), j’ai été désignée d’office pour prêcher lors de leur culte dominical. Un vrai défi sachant que je n’ai encore jamais fait cela en France… Grâce à Béryl, comme je n’avais pas trop le temps entre le moment où je l’ai su et celui où on devait envoyer le texte en Tchéquie, j’ai pu bénéficier d’une prédication qu’elle avait préparée et que je n’ai plus eu qu’à adapter à mes idées et à ma façon de m’exprimer. Hana avait commencé la traduction mais avait besoin de certaines précisions pour être sûre d’avoir bien compris ce que je voulais dire. Pour toutes les phrases où elle n’était pas sûre, je lui ai expliqué ce que je voulais dire en donnant des exemples ou en m’exprimant différemment, ce qui lui a permis de finir la traduction. Je lui ai aussi donné le texte de ma prière pour qu’elle la traduise et nous nous sommes mises d’accord pour dire la bénédiction d’Aaron toutes les deux. Heureusement j’avais emporté ma Bible et j’ai donc pu en récupérer le texte exact.

Après le travail, la découverte. Hana et une des jeunes organistes de l’église, Esther, nous ont amené visiter la plus grande maison de retraite de la diaconie de l’église des Frères Tchèques, à quelques kilomètres de la ville. 140 personnes âgées sont accueillies en permanence, hommes et femmes, certaines en bonne santé et encore très mobiles, d’autres peu mobiles, d’autres grabataires ainsi que des malades d’Alzheimer dans un des trois bâtiments. Tous avaient l’air très bien traités, avec du personnel dévoué. Beaucoup de chambres ont été rénovées récemment, avec l’aide souvent de l’Union européenne, d’autres chambres sont encore un peu vieillottes. Nous avons rencontré des pensionnaires en pleine forme, membres d’un « club des chatonnes » qui occupent leur temps libre à broder, tricoter, crocheter et de temps en temps vendent leur production. Elles nous ont très gentiment offert un chat tricoté et une tasse et soucoupe en crochet. Elles ont une pêche d’enfer ! Nous avons aussi rendu visite à une très vieille dame, ancienne professeur d’université de tchèque et français, qui nous attendait avec impatience et était très heureuse de pouvoir parler français avec des françaises. A la fin, elle nous a demandé de revenir la voir, nous avons dû lui faire comprendre que c’était très peu probable malheureusement !

Après un déjeuner dans le réfectoire avec le même menu que les pensionnaires, tout à fait correct, nous sommes parties en forêt par un temps très agréable, rejointes par une paroissienne parlant français qui a guidé Françoise et moi jusqu’à un sommet rocheux à 1000 mètres d’altitude (les « 3 pierres ») d’où l’on avait une vue superbe sur un paysage de moyenne montagne (on a vu des petites stations de ski sur la route et il y avait encore un peu de neige sur les sentiers ombragés). Ania a marché plus tranquillement avec Hana et après cette promenade, nous sommes allées voir de l’extérieur (il était trop tard pour la visite) les superbes bâtiments d’une ancienne papeterie qui imprime entre autres le papier à lettres filigrané du président de la république tchèque, ainsi qu’une vieille église en bois. Nous avons dîné tôt chez cette paroissienne en discutant agréablement, avec elle et sa belle-mère, musicienne à l’aide de temps en temps d’un gros dictionnaire franco-tchèque en trois volumes.

Dimanche, le grand jour ! Culte à 8h45 ! Il y a juste à traverser le jardin pour arriver à l’église et y rentrer par la sacristie. Nous nous sommes mises d’accord sur la façon de procéder et les moments où j’allais intervenir. J’ai oublié de dire que le tchèque est une langue vraiment différente du français et que l’on ne peut reconnaître que certains mots, donc heureusement que Hana parle français ! Les paroissiens arrivent petit à petit (une cinquantaine au total, de tous les âges), je reconnais Esther (à l’orgue), la responsable de la maison de retraite qui nous a fait visiter, celle chez qui nous avons dîné, sa belle-mère. Je m’installe avec Hana dans un fauteuil dans le chœur. Un culte assez court en théorie (peu de liturgie) rallongé par une prédication à deux voix. Les cantiques sont un peu difficiles à suivre (sauf un, voir plus bas !) et ce que je chante en essayant d’y mettre l’accent ne ressemble pas beaucoup à ce que j’entends ma voisine pasteur chanter…
Quatre moments très forts pour moi, pour cette première, presque dans la peau d’un pasteur : la prédication avec un paragraphe en français suivi de la traduction en tchèque, le chant de « A toi la gloire » en deux langues, nous en français et eux en tchèque (la joie dès que j’ai reconnu la mélodie !), la prière que j’avais composée et la bénédiction à deux voix également. Après, défilé des paroissiens à la sortie et j’ai été chaleureusement remerciée, à deux occasions, par la belle-mère chez qui nous avions dîné et qui avait été très émue par la prédication. La façon qu’elle a eue de me le dire m’a beaucoup touché.

Rencontre dans une salle paroissiale ensuite avec les paroissiens intéressés (20 à 30, avec café et gâteaux) pendant laquelle j’ai pu longuement présenter et commenter ce que Jaona avait préparé sur l’histoire du protestantisme français, de l’ERF et de notre paroisse. Cette rencontre a duré près de 1h30 avec de nombreuses questions (comment conserver les jeunes, baptême des enfants, activités…). Ils ont été très surpris d’apprendre que la région parisienne comptait autant d’habitants que la république tchèque toute entière ! Les échanges n’étaient pas toujours faciles car il n’y avait pas d’interprètes officiels, seulement des bonnes volontés mais l’échange a été très vivant et intéressant et intéressé des deux côtés.

Petit coup de pompe ensuite pour moi après la tension du culte et de la rencontre ! Epuisée mais heureuse de ces échanges, de cette nouvelle richesse, des rencontres faites. Après le déjeuner, nous sommes reparties vers Prague, en sens inverse, en récupérant un groupe à chaque arrêt pour poursuivre ensemble la suite de notre périple.

Isabelle Béchon
Mai 2010

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